« Les Champs libres » : sur la droite de la photographie, au milieu. C’est le grand rectangle couleur brique qui contient le » Musée de Bretagne « . Le truc à parois vitrées, voilà la bibliothèque, et la demi-boule noire, je ne sais pas.
Vous pouvez vous rendre compte que je ne suis pas enthousiaste de l’architecture !
( pratique : le garage à voitures souterrain, payant, sur la gauche, du côté du cinéma. Mais que c’est triste, tout ça ).
Accueil : pas professionnel. Une des jeunes employées ne sait rien, l’autre…
Nous allions voir » Anne de Bretagne à Rennes « , au Musée de Bretagne. Pauvre duchesse…
J’en reparlerai, ensuite. C’est loupé. On la trouve au milieu de vestiges archéologiques.
Le temps de se remettre de la stupéfaction, et on aperçoit de l’autre côté des escaliers deux affiches annonçant une exposition sur les costumes d’antan et les métiers. Oui, intéressant, vivant, à base de photos prêtées par des particuliers et de quelques costumes. Que portaient les ecclésiastiques et les militaires, les pêcheurs et les métiers de la mer, dans les conserveries, etc, les magistrats, les infirmières et les pompiers ?
» Quand l’habit fait le moine » – tel est le titre.
L’ambiance est sombre, sans ouvertures vers l’extérieur, bas de plafond, étant donné la courte hauteur, et… on manque d’air, au point de souhaiter sortir.
Mais… on voit l’annonce : » AFFAIRE DREYFUS « . Effectivement le fonds est riche de plus de 6 000 documents ( visiter le site internet ).
C’est à Rennes que le malheureux capitaine Dreyfus subit une des étapes de son calvaire, et ce ne fut pas la dernière. Je me réfère au grand livre de Jean-Denis Bredin » l’Affaire » ( Julliard, 1984 ).
Les Chambres réunies de la Cour de Cassation ont délibéré du 1er au 3 juin 1899 :
» A pas lents, lourdement vêtus de leurs robes rouges et de leurs hermines, chamarrés de leurs décorations, les hauts magistrats entrèrent en séance. Et dans un » effrayant silence « , le Premier Président Mazeau lut, d’une voix solennelle, parfois cassée par l’émotion, l’arrêt qui fixait la révision :
» Par ces motifs et sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens, la Cour casse et annule le jugement rendu le 28 décembre 1894 contre Alfred Dreyfus, et envoie l’accusé devant le Conseil de guerre de Rennes »…
» C’est la victoire ! Jaurès, Clemenceau, Bernard Lazare, Mathieu Dreyfus, Leblois, tous les grands artisans de la révision sont là. Tandis que les juges se retirent, on s’embrasse, on pleure. Lucie Dreyfus aussitôt prévenue laisse éclater sa joie. On annonce la nouvelle aux enfants. Le grand voyage est fini. Papa va revenir »
( p. 355 )
Dreyfus peut quitter sa case de l’Ile du Diable où sa détention a duré quatre ans et trois mois.
Oui, mais à son arrivée, il sera enfermé dans la prison militaire de Rennes.
Le premier procès de Dreyfus a duré trois jours, le second va durer cinq semaines du 7 août au 9 septembre.
Il se tient dans la grande salle du théâtre du lycée à Rennes qui a été transformée en salle d’audience, tandis que toutes les rues aboutissant à l’avenue qui borde le lycée sont fermées, témoigne Mathieu Dreyfus ( frère du capitaine ) : » Rennes a l’apparence d’une ville assiégée « .
Il faut présenter son sauf-conduit à chaque passage, à chaque barrage.
Dreyfus inspire la compassion, mais quand vient l’appel, le président l’interrompt, lui pose des questions sur un ton brutal. Dreyfus répète fermement qu’il est innocent. Les séances ont lieu à huis-clos. Des pressions s’exercent afin que l’avocat Labori ne s’exprime pas. Demange plaide cinq heures, et termine sur » de pauvres mots « .
Et le Conseil de guerre rend cette décision : » à la majorité de cinq voix contre deux, oui, l’accusé est coupable. A la majorité il y a des circonstances atténuantes « . Dreyfus est condamné à dix ans de prison !
La foule est muette… Demange en pleurs, Dreyfus droit et digne… il devrait être dégradé une seconde fois ! Mathieu se rend compte que son frère ne peut plus supporter ces épreuves. Et le conseil de guerre recule, car la France gronde, » la conscience universelle » s’émeut partout. Waldeck-Rousseau, Président du Conseil, était consterné. Alors le Conseil de guerre de Rennes se réunit, demanda que la sentence ne fût pas exécutée.
Nouvelle révision, pour l’honneur, ou demande de grâce ? Un médecin visita Dreyfus toujours dans sa prison, et constata qu’il ne pouvait plus endurer la détention. Au Conseil des ministres du 19 septembre, Emile Loubet, Président de la République, signa le décret graciant Dreyfus.
Il y avait encore bien des procès en cours, dont celui d’Emile Zola. Waldeck-Rousseau choisit la paix sociale, et l’amnistie pour tout le monde.
» De Carpentras, où il se remet lentement, Alfred Dreyfus adresse au Sénat, le 8 mars 1900, une vigoureuse protestation :
» … Ce projet éteint les actions publiques dont j’espérais voir sortir des révélations, des aveux peut-être, qui m’auraient permis de saisir la Cour de cassation; il me prive de ma plus chère espérance… Je n’avais sollicité aucune grâce… Le droit de l’innocent, ce n’est pas la clémence, c’est la justice « …
( page 405 )
C’est à Rennes que l’on peut voir l’exposition permanente consacrée au capitaine Dreyfus, l’affaire si douloureuse présentée dans un film percutant, évidemment bouleversant.
Il n’y eut plus de procédures : place à l’écriture, aux livres.
En voici quelques-uns :
Je préfère passer des photographies du capitaine Dreyfus » après « , car la couverture montre l’insupportable dégradation.
» Le 13 janvier 1898, l’Aurore publie sous un titre énorme – J’accuse – repris de Lazare par Clemenceau, la lettre ouverte au président de la République signée d’Emile Zola, qui mit le feu aux poudres.
» … L’Aurore avait été tirée à 300 000 exemplaires, le décuple de l’ordinaire. Succès colossal, scandale immense «
( Editions de Fallois, 2014 – page 125 – le » J’accuse » ne peut plus être utilisé, à mon avis. Il ne doit l’être que pour cette circonstance unique, pour Dreyfus).
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